Bilan d’une course riche en apprentissages !
La course s’annonçait difficile et un condensé de nouvelles expériences. Un programme parfait pour les bizuths que nous sommes ! Comme souvent, tout ne s’est pas tout à fait passé comme prévu : Je vous raconte !
Un départ dans les petits airs et la chaleur en baie de Concarneau
Pour conclure une semaine de préparation estivale, nous sommes partis le jeudi après midi pour un parcours d’environ 380 milles entre Ouessant et l’île d’Yeu.
Le vent faible, la chaleur et la météo annonçaient une dégradation et l’arrivée de forts orages dans la nuit.
Le début de la course annonçait déjà le niveau de difficulté de la suite ! Un vent très instable avec de gros trous d’air difficiles à repérer et à éviter, il fallait être à l’affut du moindre mouvement sur l’eau… Un début de parcours technique, avec des manœuvres de changement de voiles à placer aux bons moments !
Une première nuit qui démarre bien et qui termine… Moins bien
Positionnée en milieu de flotte en début de nuit, tout est à faire, la course est encore longue ! Nous sommes encore groupés entre le raz de Sein et Ouessant. La nuit est claire, on voit super bien les étoiles et c’est stimulant de voir tous les feux de mâts évoluer, accélérer ou ralentir autour de moi !
Le ciel se couvre et les orages commencent à se rapprocher, les éclairs zèbrent le ciel de temps à autres et éclairent les bateaux autour de moi ! Encore quelques manœuvres à enchaîner avant de passer l’île de Sein et de partir pour un long bord en direction de Belle île…
Rien de compliqué en apparence : un long bord de près en bâbord dans 20 nœuds de vent.
Mais, j’ai du mal à trouver une bonne vitesse et je commence à voir mes concurrents de devant s’éloigner et ceux de derrière se rapprocher ! Je fais tout mon possible pour trouver de meilleurs réglages, il fait nuit donc je ne vois pas si j’ai des algues dans ma quille mais dans le doute j’effectue quand même des marches arrières pour essayer de m’en débarrasser… Rien n’y fera et ce déficit de vitesse me propulsera en queue de peloton au lever du soleil…
Mais rien n’est perdu ! Les orages peuvent rabattre les cartes et tout peut arriver !
Une deuxième journée orageuse !
Prévision météo : Grains orageux avec des vents pouvant aller jusqu’à plus de 40 noeuds
Réalité : Grosse masse orageuse s’étalant entre Penmarch et Les Glénan, vent absent et clapot court et serré qui fait reculer, de l’électricité statique dans l’air et de temps en temps un éclair qui touche l’eau ! Impressionnant !
Si vous avez suivi la course à la cartographie, vous n’avez pas dû y comprendre grand chose ! A bord, l’ambiance c’était un peu Action / Réaction !
On envoie le spi, il gonfle pendant 10 minutes, puis le vent tourne, le spi se gonfle à l’envers, on affale le spi, le vent tombe, on recule, puis le vent revient, on déroule le gennaker ! Puis le vent tombe à nouveau, on roule le gennaker. Finalement on se retrouve au près, le seul moyen d’avancer est de s’écarter de la route… Bref, de quoi se faire des nœuds au cerveau !
Heureusement, le vent finit par rentrer et se renforcer ! On passe alors en mode glissade !
Glissade et récupération
C’est parti pour une grande descente entre Belle île et l’île d’Yeu sous gennaker avec 18 à 25 noeuds de vent, l’allure où le bateau peut montrer tout son potentiel !! La nuit tombe et la lune se lève : un spectacle magnifique. Une grosse boule orange apparait dans le bleu nuit du ciel …
Déjà plus de 24h que nous sommes partis et les occasions pour dormir ont été très rares ! Entre les changements de voiles, les manœuvres, le vent qui tourne, et les concurrents toujours à vue…. Seuls quelques petits créneaux de 5 – 10 minutes par-ci par-là permettent de se reposer, autant dire : trop peu !
Je commence à me sentir fatiguée. Heureusement pour moi, le bord suivant est un bord de près dans 15 noeuds de vent. Une fois le bateau réglé et rapide, c’est le bord idéal pour se reposer. Les siestes ne durent pas des heures, mais sont fractionnées en 10 – 20 minutes de sorte à toujours garder un œil sur ce qui se passe dehors (sécurité) et rester toujours rapide (régate!).
Il semblerait que les concurrents autour de moi aient adopté une stratégie similaire ! Nous sommes plusieurs à faire les même trajectoires. Il faut dire qu’il vaut mieux reprendre des forces, la suite (et fin) de la course s’annonce mouvementée !
Dernier bord
A avoir en tête : on va enrouler le plateau de Rochebonne, en face de La Rochelle, puis cap Nord Ouest vers Concarneau ! Un long bord de gennak dans un vent forcissant, promettant à nouveau de belles glissades pendant 7 – 8h ! Il va falloir être dessus non-stop, soit à la barre, soit aux réglages. Pousser le bateau à fond, et tout donner le temps de ce dernier bord ! Vous comprenez maintenant l’intérêt d’avoir réussi à se reposer un peu sur le bord précédent…
Trop bon !! Le bateau file à 14 noeuds de moyenne, des gerbes d’eau de tous les côtés. Il faut s’accrocher pour ne pas se faire balayer par une vague ! Je suis au sec dans ma combinaison sèche, les yeux plissés, je n’ai jamais autant bu d’eau salée ! Mais je n’ai aucune envie de lâcher la barre, les sensations sont trop bonnes ! Alors même fatiguée, trempée et plutôt en fin de classement, je m’arrache pour faire marcher mon bateau et grapiller quelques places avant l’arrivée !
Finish : 26ème sur 33
Le résultat n’est pas forcément à la hauteur de ce que j’attendais. Mais après plus de 50h de courses, j’arrive seulement 3 petites heures après les premiers, et dans le paquet avec les autres bizuths.
J’ai appris beaucoup de choses et je connais les points importants sur lesquels il faut que je fasse attention à l’avenir. La gestion de moi même est un des points les plus importants : trouver les moments pour se reposer et récupérer. Ne pas négliger l’hydratation et l’alimentation même quand on est pris à fond dans la navigation. Avoir confiance en mes choix, mes trajectoires et ma vitesse. Et bien sur, j’ai encore plein de choses à apprendre en ce qui concerne la météo et la stratégie au large !
Pour revivre la course, vous pouvez aller faire un tour sur leur site : SOLO GUY COTTEN
Je viens de découvrir les étapes du figaro. C’est du très costaud ! J’ai beau jeu, assis sur mon fauteuil de retraité, à chercher des mots qui claquent. Cela va être une sacrée affaire ! Les mots qui me viennent: entrainement , matériel, réglages, se projeter, piégeuse, 4 nuits à gérer,rebondissements , Rien n’est acquis, rien n’est perdu. Dans tous les cas ,une sacrée expérience riche en apprentissages.
Bon vent « Sniffeuse d’embruns » !
On est dans la course à 200%. C’est intense , fort , grisant.On te souhaite des sensations similaires pour tes prochaines courses ,avec un brin de réussite en plus (maudit goémon). A faire parler la poudre Cap’taine Charlotte !
Merci pour le débrief, on a l’impression d’être à bord!, vivement la suite…