La grande course
Au programme : 460 milles nautiques sur un parcours semé d’embuches ! Deux traversées de la manche, ses courants et ses cargos ; le long des côtes sud Angleterre, les effets de pointe, les baies ; puis la traversée des îles anglo-normandes et le fameux Raz Blanchard !
Ma préparation était plutôt claire, épaulée par le coach du groupe de La Rochelle Etienne Saïz et le routeur météorologue Christian Dumard.
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Après un petit parcours côtier à la sortie du Havre, direction l’Angleterre ! Comme prévu, la première traversée de la Manche s’effectue dans la molle, la première nuit. Dans le vent faible, il faut toujours être à l’affut du moindre souffle d’air pour adapter ses réglages, ajuster sa trajectoire : impossible de dormir.
Le vent ne tourne pas tout à fait comme prévu, et mon placement s’avère finalement plus difficile que prévu. La flotte est très dense, les écarts sont très faibles à l’arrivée sur les côtes anglaises. Je me situe entre la 15ème et la 20ème place. Ca ne fait que commencer et il va y avoir des coups à jouer ! A chaque pointe, chaque baie du Sud de l’Angleterre se jouent des effets de vent et de courant qui peuvent faire tout basculer.
Nous commençons à tirer des bords en suivant les bascules de vent et de courant. Toute la flotte joue dans un mouchoir de poche ! La bagarre s’annonce rude.
En arrivant dans la Baie de Portland, les militaires anglais nous appellent pour nous signaler une zone interdite, ils sont en plein exercice, ce qui bouleverse nos plans et nous empêche d’aller nous abriter du courant au fond de la baie.
« L’option de Charlotte Yven »
Arrivée à la pointe de Portland Bill, deux options s’offrent à nous en fonction du timing. S’abriter du courant dans la Baie de Lyme, ou profiter de la renverse en poursuivant vers le large. Je passe la pointe pile à l’heure de la renverse de courant, et profitant aussi d’une bascule de vent : je prend l’option large ! Voyant les autres continuer dans la Baie, je tourne l’option dans tous les sens pour être sûre de mon choix, ça me semble être vraiment le bon : je fonce !
L’option s’avère vraiment payante et je me retrouve à croiser devant toute la flotte ! Me voilà poursuivi par la tête de flotte, et ils vont très vite ! Rapidement ils me recollent, je n’ai pas encore les manettes pour aller aussi vite et je les vois revenir. Je fais tout mon possible pour rester au contact des premiers !
La fin de la nuit va se jouer au rase-cailloux à Start-Point, entre les grains, autant vous dire que je n’ai encore pas beaucoup dormi ! Je lutte contre le sommeil et je me retrouve même à m’endormir devant l’ordinateur, cartographie allumée et souris en main (heureusement vers le large et non vers la falaise…) ce qui me vaudra un réveil en sursaut et une petite frayeur !
J’enroule le phare d’Eddystone encore à la 3ème place derrière Corentin Horeau et Tom Laperche, rapides et impitoyables.
La gestion de la fatigue…
Après une modification de parcours, exit Roscoff 😢, la flotte met le cap directement sur la Jument des Héaux de Bréhat. Une looooongue traversée de la manche, au portant, à slalomer entre les cargos et les algues. L’occasion de faire sécher les affaires, se reposer (un peu), s’alimenter, et continuer à cravacher pour ne pas trop se faire distancer !
La fatigue commence à se faire bien sentir mais je suis toujours à la 6ème place 🥵La 3ème et dernière nuit se passera entre les îles anglo-normandes, à s’abriter du courant, puis gérer la renverse pour passer le Raz Blanchard.
Au passage de Guernesey, la lucidité commence à me faire défaut et je me fais prendre au piège. Je choisi de rallonger ma route, espérant prendre une renverse de courant plus favorable du côté d’Aurigny. L’option ne paye pas et me fait perdre 5 places ! Me rendant compte de mon erreur, je me remet dans le wagon pour protéger ma place et profite du dernier bord pour me reposer, ça tire bien sur l’organisme !!
Une dernière manœuvre, changement de voile pour un dernier petit bord avant l’arrivée. Je suis épuisée mais je tiens bon et je me bat jusqu’au bout pour la 11ème place ! Pas question d’en perdre une de plus !
Contente du résultat
Je suis super contente de ma course, fière de mon option et de n’avoir rien lâcher jusqu’au bout !
Au total je pense avoir dormi au total 4 ou 5 heures, sur 3 jours et 3 nuits de course, c’est peu 😴
Je garde en tête des images incroyables, de coucher de soleil, des côtes anglaises, du passage du phare d’Eddystone ! Des souvenirs inoubliables, d’être en tête de la flotte pendant quelques heures, de la pétole de la première nuit, de la pluie so british et d’un grain à 35 noeuds avec de la grêle dans la nuit noire, des passages des cargos et du combats contre les algues !
A peine de temps de se remettre des émotions de la grande course, retrouver ses esprits et récupérer un peu d’énergie, ça enchaîne !
Parcours côtiers
Après une journée OFF au cours de laquelle nous avons fait une petite régate en équipage en j80 en embarquant des membres du club, le programme était aux parcours côtiers !
Comme pour la Solo Maître Coq , j’abordais ces dernières manches plutôt sereinement, comme un format que j’aime bien car il ressemble à ce que je connaissais en 470 : un format court, intense, où il faut aller vite et chaque petit placement compte !
Mais cette fois ci j’ai un peu manqué de réussite et la fatigue accumulée s’est faite sentir…
Mon objectif principal était de m’appliquer sur les départs pour être présente dès le début de course, c’est toujours plus facile quand on part devant !
Vendredi : parcours de 30 milles au Sud du chenal d’entrée au Havre, ma stratégie était bien établie, bascules de vent, courant de la Seine, slalom dans les cargos au mouillage
Je suis contente de mon début de course, passage à la bouée de dégagement dans le top 10, jusque là tout va bien. C’est ensuite que ça se complique ! J’ai du mal à trouver de la vitesse sur la remontée au près, la navigation dans le clapot de la Baie de Seine est difficile et je ne fais que perdre des places.
La flotte est dense et c’est très difficile de revenir dans le paquet, les places coûtent cher ! Je terminerais la manche à la 17ème place, déçue de ne pas réussi à avoir trouvé les manettes pour faire avancer mon bateau !
Encore un bon départ : objectif atteint
La suite est plus compliqué, manque de vitesse encore… Cette fois-ci la cause est identifiée : je ratisse toutes les algues de la baie !
Naviguer avec des algues dans les appendices, c’est un peu comme jeter l’ancre, alors je lutte pendant toute la remontée au près pour m’en débarrasser et j’en perds le fil de ma stratégie, j’oublie la renverse de courant… Malgré tous mes efforts, je ne parviendrais pas à revenir au delà de la 22ème place : frustration !
Le bilan est mitigé !
Je termine 15ème sur 28 participants et 2ème féminine à égalité de point !
Que d »emotions Charlotte en lisant ton récit, !
BRAVO pour ta performance ton courage et ta ténacité , continue à nous passionner.
Bravo Charlotte et merci pour ton récit qui nous donne l’impression d’être à bord! (enfin presque:))